Voici un article publié dans le Sud-Ouest de ce jour. Info relevée sur SARA.
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AMÉNAGEMENTS ROUTIERS. - Depuis plus de deux ans, ils façonnent au quotidien le plus grand chantier depuis celui de l'autoroute. Rencontre avec les ouvriers et responsables des travaux de la 2x2 voies
Les hommes de la RN 21
Voilà plus de deux ans que les bulldozers, rouleaux compresseurs, foreuses, tombereaux articulés et autres niveleuses sont partis à l'assaut des coteaux surplombant Villeneuve-sur-Lot, le long de la vallée du ruisseau de Larpigne, entre le giratoire des trois Mulets et le pont de la Nauze. C'est là que se tient le chantier de rectification des virages de Pujols. Placé sous la maîtrise d'?uvre de la Dirco (Direction interdépartementale des routes Centre-Ouest), ce chantier est tout simplement le plus important que le département du Lot-et-Garonne ait connu depuis la construction de l'autoroute A 62 à la fin des années soixante-dix. Quelques chiffres marquants suffisent à en mesurer l'ampleur (lire par ailleurs).
Représentant un investissement de l'ordre de neuf millions d'euros, le tracé en deux fois deux voies forme un grand S dans la vallée. Une courbe suivie d'une contre-courbe qui serpentent sur une distance de 3,3 kilomètres, avec un dénivelé de 5 à 6 %. Cette impressionnante excavation au milieu des falaises calcaires va permettre de contourner les redoutables virages de Pujols, dont la sinistre réputation ne tient en rien du mythe.
Venus de Loire-Atlantique. Au plus fort du chantier, lorsque les travaux de terrassement battaient leur plein, de mai à octobre 2006, on a dénombré jusqu'à 55 ouvriers et personnes chargés de l'encadrement. Du personnel qui travaille pour le compte de l'entreprise Charier et Semen, de Montoir-de-Bretagne, petite commune située à proximité de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Une entreprise de BTP spécialisée dans ce type de chantiers, qu'il s'agisse de l'aménagement de lignes de TGV, du percement d'autoroutes ou de la construction de routes nationales en 4 voies.
Originaire de Missillac, à deux pas de la Bretagne, Sébastien Lefèvre travaille depuis 26 mois sur le chantier pujolais, du lundi après-midi au vendredi midi. « Moi, je suis venu avec ma caravane que j'ai déposée chez des particuliers. D'autres logent dans des gîtes. Chaque week-end, je remonte chez moi pour retrouver toute ma famille. Cela fait beaucoup de route, mais on ne peut pas faire autrement. Cela fait partie du boulot. On est éloignés de nos proches. La solitude pèse parfois. Mais l'avantage, c'est que le travail est intéressant. Ici, on a commencé en bas de la vallée sur une partie plus sablonneuse, avec des marais et c'est devenu de plus en plus rocailleux au fur et à mesure que l'on grimpait », témoigne le conducteur de niveleuse.
Une trancheuse de Hollande. « C'est un beau chantier », estime avec un regard de connaisseur Hervé Gaudet. A 38 ans, cet autodidacte a franchi tous les échelons jusqu'à devenir responsable de chantier « L'exploitation du déblai s'est avérée très hétérogène. On est passé dans des fonds de vallée avec des roches très friables avant d'attaquer des calcaires nécessitant l'emploi d'explosifs. Le chantier a présenté tous les niveaux d'altération possibles », indique-t-il. Et de préciser : « Avant de monter les remblais, il a fallu préparer toutes les assises. On a drainé les sols en creusant des tranchées de quatre mètres de profondeur sur 30 centimètres de large. Rien que pour mener à bien ce travail, il a fallu faire venir de Hollande, sur un porte char, une trancheuse de grande profondeur ».
Guidés au laser. Sur place, les ouvriers se sont répartis à travers six ateliers distincts. L'un consacré spécifiquement au concassage, trois ateliers destinés aux terrassements et deux ateliers assurant les travaux d'assainissement et de finition.
Aujourd'hui, le chantier de rectification des virages de Pujols, qui s'est traduit par le déplacement de quelque 720 000 m³ de déblais rocheux, est en phase terminale. Aujourd'hui, seule une dizaine d'ouvriers et d'encadrants achèvent les travaux. Guidée par laser, la niveleuse pilotée par Sébastien Lefèvre règle au centimètre près la couche de forme de la route. Laquelle doit être lisse comme un billard avant de recevoir les 36 centimètres de bitume. Un ultime chantier dont la date n'est pas encore fixée.
Rendez-vous en février. En attendant, le tracé va être recouvert d'un enduit de protection hivernal. Les opérations se déroulent sous le regard méticuleux d'Alain Polo. Âgé de 56 ans, ce contrôleur de travaux est l'archétype de l'employé ayant franchi tous les échelons grâce aux concours internes au sein de l'ex DDE (Direction départementale de l'Équipement). L'ancien cantonnier peut, à juste titre, nourrir une certaine fierté en voyant le chemin parcouru lors de sa carrière. Aujourd'hui, Alain Polo occupe la fonction de contrôleur des travaux pour le compte de la Dirco. Il veille au respect attentif du cahier des charges du chantier, contrôlant les métrés (relevé des quantités de terre déplacées) et de l'altimétrie. Le tout donnant lieu, in fine, à la levée des points d'arrêt.
La première phase du chantier va s'achever dans les prochains jours. La deuxième phase débutera en février prochain. Il s'agira alors de contourner la commune de Saint-Antoine-de-Ficalba. Un chantier d'une longueur de 3,5 kilomètres mais qui sera beaucoup plus rapide que le précédent, car ne présentant pas les mêmes difficultés techniques et ne nécessitant pas de déplacer la bagatelle d'un million de mètres cubes de terre.
Jérôme Souffrice.